L'origine du savoir (2ème partie)
Le casse-tête posé par le peuple Dogon, au Mali (Afrique de l'Ouest)
Les Dogons ont un système de croyances sophistiqué qui se concentre sur l’importance de l’étoile Sirius, qui est, en termes galactiques, un voisin proche. À 8,7 années-lumière de distance, c’est la deuxième étoile la plus proche de notre propre système solaire. Deux anthropologues français, Marcel Griaule et Germaine Dieterlen, qui ont vécu et étudié les Dogons pendant de nombreuses années avant et après la Seconde Guerre mondiale, avaient noté un trait très curieux : les Dogons croyaient que Sirius était accompagné par une autre étoile, d’une incroyable lourdeur, invisible. Ils l’appelaient po tolo — l’étoile po (Po est une minuscule graine d’un type de céréale connu sous le nom de fonio, qui encapsule bien la petitesse de l’étoile.) En fait, on sait maintenant que Sirius est un système stellaire binaire (ou peut-être même trinaire), et que l’étoile brillante que nous pouvons voir de la Terre a un compagnon invisible à l’œil nu — ou, en fait, à tout télescope, sauf le plus puissant. L’existence de Sirius B, telle est la dénomination de l’étoile invisible, n’a été soupçonnée par les astronomes que dans les premières décennies du XIXe siècle, lorsque des anomalies dans les mouvements de Sirius suggèrent l’attraction gravitationnelle d’un corps céleste massif proche. Il n’a été observé de façon concluante qu’en 1842 et n’a été photographié qu’en 1970.
On sait maintenant que Sirius B est une étoile naine blanche, composée d’une matière extrêmement dense, de sorte que, bien que relativement petite, elle exerce encore une attraction gravitationnelle énorme. Étonnamment, les Dogons semblent même connaître la période qu’il faut à Sirius B — une cinquantaine d’années — pour orbiter autour de son grand compagnon. Ils commémorent cet événement par une cérémonie spéciale qui a lieu tous les cent ans, en réalité cinquante, en raison de leur système particulier de calendrier en “années doubles”.
Les Dogons prétendent également que Sirius est en fait un système trinaire — une troisième étoile, qu’ils appellent l’ "étoile des femmes" (emme ya tolo) est également en orbite autour de Sirius A.
La connaissance que les Dogons ont de l’existence de Sirius B reste encore un mystère, mais leur savoir ne s’arrête pas là.
En plus de connaître l’existence des anneaux de Saturne et des principales lunes de Jupiter, ils savent que la Voie Lactée se déplace réellement sous la forme d’une spirale, que notre lune est sans vie et que la Terre tourne sur son axe. Ils savent que les étoiles sont vraiment des soleils — par exemple, leur nom alternatif pour l’Étoile des femmes (Sirius C) est yau nay dagi, qui signifie le ‘Petit soleil des femmes’.
Certains sceptiques ont tenté d’expliquer la connaissance Dogon de Sirius en l’attribuant à des missionnaires chrétiens itinérants qui ressentaient le besoin de transmettre ce savoir quelque peu anachronique et hautement spécialisé aux Dogons. À leur tour, les Dogons se sont sentis obligés de l’ajouter à leur religion. En fait, la première mission chrétienne au Mali n’a été établie par les protestants américains qu’en 1936, lorsque la religion basée sur Sirius était déjà profondément ancrée dans la culture Dogon. Certains, comme Robert Bauval ont suggéré que peut-être, dans un passé récent, Sirius B était plus brillant et donc visible depuis la Terre. Mais les astrophysiciens ont établi que cela a cessé d’être possible il y a des dizaines de millions d’années. Même si c’était le cas, les deux étoiles sont si proches l’une de l’autre qu’à cette distance, elles seraient apparues comme une seule et unique.
Les Dogons croient aussi que leurs ancêtres ont appris les arts de la civilisation par des dieux appelés les Nommos — ou plutôt des demi-dieux, parce qu’on croyait que les Nommos étaient des émissaires du dieu unique, Amma — qui est descendu sur Terre, dans un passé lointain, dans une ‘arche’. Les Nommos étaient décrits comme les esprits de l’eau qui habitaient tous les plans d’eau, des mers jusqu’aux plus petits étangs. Les descriptions par les Dogons des Nommos montrent qu’ils ressemblaient à des poissons.